Une nouvelle identité pour la République

Quel graphiste n’a pas cherché le logo vectoriel de tel ou tel ministère et pesté de ne pas trouver la bonne version ? Et bien… c’est terminé. La République s’est dotée depuis février 2020 d’une nouvelle identité visuelle qui unifie la communication de l’État. Et c’est tant mieux pour le public comme pour les professionnels de la communication.

Au terme d’un appel d’offres mené par le SIG (Service d’information du Gouvernement), deux agences ont été choisies pour refondre totalement l’identité graphique de l’État : 4uatre pour le branding et Madame Bovary pour la stratégie et la création. L’ambition affichée est de rendre plus lisible la communication étatique : « Là où l’État est présent, agit, finance, sa présence doit être clairement identifiée ».1Il y avait urgence tant le système graphique qui précédait avait vieilli après 20 ans (quand même) de bons et loyaux services.

Un concept vieillissant

Créé en 1999, le bloc-marque de l’État se composait d’un cartouche contenant une Marianne, la mention République Française et la devise de la république : Liberté, Égalité, Fraternité.Cet ensemble était peu lisible à une taille de reproduction normale et, la plupart du temps, accompagné d’un deuxième logo (d’un ministère ou d’une entité étatique). Outre la difficulté d’harmoniser les tailles de ces deux images, conséquence des niveaux de visibilité disparates, les esthétiques s’entrechoquaient souvent… pour un résultat peu efficace. Le système graphique a subi au fil des ans plusieurs évolutions qui n’ont pas amélioré sa lisibilité : un deuxième cartouche est venu se coller au cartouche de base pour contenir le logo ou le nom du ministère, mais cela restait bancal et désuet du fait de l’encadrement, par ailleurs trop fin. Dans les cas où le projet était interministériel, on se retrouvait avec une colonne de cartouches du meilleur goût…

L’État avait donc une marque, mais celle-ci n’était pas – ou mal – utilisée par l’ensemble des services, déconcentrés ou non. L’absence d’un système identitaire complet et de règles d’utilisation définies a créé un manque de cohérence et une faible valeur d’usage du système. Rajoutez à cette situation des chartes visuelles différentes pour certaines institutions et une inadéquation générale à l’affichage sur les réseaux sociaux (qui n’existaient pas en 1999) et vous obtenez une dilution de la communication de l’État avec, en corollaire, un manque de visibilité de ses actions. À l’heure où toutes les études montrent que les citoyens français doutent des services publics et du personnel politique, il fallait ramener du sens, de la praticité, de l’unité dans la communication de la République, tout en architecturant le nouveau système pour qu’il soit modulable, pérenne, et adapté à toutes les utilisations.2

L’aboutissement d’une réflexion

La nouvelle identité graphique s’est construite autour de trois grands principes : réaffirmer les emblèmes de la République : le bleu-blanc-rouge et la Marianne déjà présents dans le précédent bloc-marque, symbolique connue et appréciée des Français ; clarifier l’action de l’État grâce à un fonctionnement rationalisé et commun ; enfin s’appuyer sur un système graphique complet, identique à tous les niveaux de l’État : gouvernement, ministères, secrétariats d’état, préfectures, ambassades, institutions… Cette nouvelle structure graphique devient utilisable quels que soient les supports ou les médias. La charte graphique publiée avec la présentation du bloc-marque pousse très loin la définition de toutes les utilisations, jusqu’aux affiches par exemple, marquant ainsi la volonté de recréer une image forte et unique dans le but de simplifier la compréhension du citoyen et sa perception de l’action publique.

Une valeur d’usage optimisée

La Marianne légèrement relookée devient le symbole de la République, au point que la mention « République Française » n’apparaît plus dans les déclinaisons de la marque.

La devise « Liberté, Égalité, Fraternité », construit verticalement, trouve une place systématique et s’habille d’une police de caractère qui reprend des fondamentaux d’une des premières fontes de l’imprimerie française (un italique de Robert Granjon créée à la moitié du XVIe siècle).

Une police a été développée spécialement pour ce qui concerne l’écriture institutionnelle – nommée Marianne en toute simplicité – elle est déclinée en 6 graisses (Thin, Light, Regular, Medium, Bold, Extrabold). Il s’agit d’un sans serif qui est réservée à l’usage exclusif des services de l’État. Son dessin fait référence au patrimoine typographique français : les proportions sont basées sur la capitale romaine (pour les capitales) et sur le Garamond (pour les bas-de-casse). La construction géométrique et synthétique (ponctuation très simple et ronde) contraste avec des formes traditionnelles plus écrites (queue du Q, a et g avec deux boucles…).

C’est l’extrabold en capitales qui est utilisée dans la marque. La puissance de la police et la force du noir équilibrent la construction de l’ensemble, se plaçant naturellement entre le côté pictural de la Marianne et celui plus souple de la devise. Plutôt réussi par rapport à ce qui prévalait jusqu’alors.

On a tous à y gagner

Les esprits chagrins viendront sans doute se plaindre que le système est coercitif et qu’il ne laisse plus de place à la création ou encadre de trop près toutes les productions graphiques. Possible, mais le gain de lisibilité et de visibilité est immédiatement évident. Pendant la récente crise de la Covid-19, la nouvelle charte a habillé les points de presse journalier, l’ensemble s’est montré à la fois efficace et moderne.

Un autre intérêt, et pas des moindres, est d’enterrer définitivement tous les logos ministériels qui se trouvaient dans l’obligation d’évoluer ou même de changer à chaque nouvelle dénomination, entraînant une gabegie financière et écologique. Cela va permettre d’importantes économies puisque la nouvelle charte a été pensée pour être très modulable.

Si vous êtes passionnés ou curieux, cette charte de la République est disponible sur le site du gouvernement. Y sont abordés tous les points, les principes, les applications suivant les entités, accompagnés même de grands principes rédactionnels.

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Michel

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